Monsieur 24
- clairemarin89
- 18 juin
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Gamine, pendant les repas de famille, je me cachais sous les tables. Je détestais rester des heures à une table.
Alors j'allais en dessous. Là où nul ne me voyait.
Je dessinais et j'écrivais en regardant les pieds des gens.
Le monde vu d'en bas me semblait bien plus intéressant.
Je devais être une sorte de Yann Arthus-Bertrand inversé.
En grandissant, j'ai un peu continué.
A Noël, ce que j'aimais, c'était travailler.
Je travaillais dans une salle de cinéma.
J'aimais voir les gens aller et venir.
Il y avait des touristes, des couples, des gens seuls parfois.
Et surtout, un homme, un vieux monsieur.
Qui venait là tous les 24 au soir.
Je ne le voyais aucun autre jour, aucun autre soir.
Il venait ce soir-là uniquement.
Il mettait un beau costume et des chaussures bien cirées.
Il avait l'allure fine et tendre. Il était si simple, si élégant.
J'aimais cet homme, profondément. Il était mon Noël à moi.
Sa discrétion, sa dignité, sa façon si intime de marcher.
Il était seul, il était debout. Il se tenait là, sans personne à son bras.
Il était vivant. Tellement vivant. A tenir le cap de l'émerveillement.
A se faire tout beau, pour cet humble moment.
A chaque Noël, je l'attendais.
J'attendais de déchirer son petit ticket.
De lui sourire. Et qu'il me sourit.
Et dans cet instant,
Saisir l'amour, la grâce, le monde entier.
Saisir toute la vie.
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